Pince-sans-rire par Amzath Abdoulaye, Consultant Politique
Cette chronique fut rédigée au lendemain de l'élection présidentielle le 13/04/2021, entre incertitudes, peurs et interrogations.
L'élection présidentielle tant controversée par les opposants et les opprimés politiques est désormais rangée dans les placards et les tiroirs du passé. Le 11 avril a vu des bureaux de vote ouverts et des votants exhibant, non sans fierté et avec une once de provocation, leur pouce taché de sang? Non d'encre.
Un exégète une fois, qualifiait les citoyens de « moutons bons qu'à être égorgés». Je ne lui donne pas raison, ce serait être cuistre. Toutefois, il est indéniable que l'électorat reste au Bénin manipulable, par qui peut (Mouvance et Opposition). Un peu comme le mouton, il est engraissé puis tué et dépecé plus tard, contre son gré et ses idées, à la seule fin de satisfaire l'appétit vorace des politiques.
Se réjouir des récents événements au Bénin, c'est souffrir d'une myopie accentuée par rapport à l'héritage de la Conférence des Forces Vives de la Nation de 1990.
Mais, qui faut-il indexer dans ce jeu d'échecs sans règles, qui a transformé le temps d'un instant, le Bénin en une sombre dystopie?
J'accuse tel Zola, les opposants et l'opposition.
J'accuse la Rupture et son égérie.
Une opposition exsangue
Les opposants sont pointés du doigt pour leur rôle de pyromanes dans le début de la crise incendiaire qui a embrasé les Collines et le Nord du pays. Mais je pense que ce rôle n'est pas le problème. L'opposition béninoise a été absente là où tout le monde l'attendait. C'était une drôle d'opposition durant le quinquennat de Patrice Talon. La politique de la chaise vide quand ce n'était pas celle de la terre brûlée. Le manque d'une cohésion au détriment de l'individualisme : «Plus opposant que moi, tu meurs ».
L'absence de stratégie pour mieux résister au pouvoir.
À un moment, j'avais l'impression qu'elle voguait au gré du vent.
Mais va-t-on blâmer les personnalités politiques de l'opposition pour ce manque de lucidité et de réalisme qui coûte clairement cher aux Béninois?
Oui. Quand on n'a pas les armes, on ne déclare pas la guerre, même si le contraire ne vous prive pas d'une défaite.
Et après?
Après, je pense que l'environnement politique de l'opposition doit être renouvelé. Les jeunes doivent prendre conscience des enjeux et prendre le relais. S'adapter ou disparaître. Changer de méthode ou s'exiler. On a toujours le choix. Car, accepter ne fût-ce qu'une infime partie de qui va arriver, c'est être complice à part entière de la catastrophe qui s'annonce. Refuser, c'est rester afin de proposer. Refuser, c'est exister. Et exister, c'est résister.
Patrice Talon et la Rupture
Les propos du président sortant Patrice Talon, candidat à sa propre succession, sont illustrateurs de la bêtise, dont le Béninois est devenu l'apanage, depuis 2016. Il n'y aura pas de dialogue. Donc tout va bien. Le déni poursuit son chemin. On verra bien jusqu'où.
De l'autre côté, en parcourant les réseaux sociaux, on est bassiné par les stupides : «Talon 10 ans» ; « Un coup K.O.».
Où est l'objectivité tant chère au peuple béninois?
Le processus démocratique est pourtant obstrué depuis le début. Mais bon, quand on supporte, on va jusqu'au bout n'est-ce pas ?
Par ailleurs, le drame est que sur 20 personnes interrogées par téléphone, à peine 2, ont entièrement lu le projet de société du duo "Talon-Talata". Ce qui démontre une autre réalité. On ne vote plus pour vous, parce que vous avez un bon projet de société mais uniquement par affinité électorale ou contrainte morale donc sociétale.
Le bilan de Patrice Talon est son boulet. Le rejet systématique dont il est l'objet et qu'il ne veut pas voir, n'est pas le fruit d'une haine gratuite encore moins d'un hasard, mais bien de son bilan et de la gestion globale du Bénin sur tous les plans.
La Rupture a rompu le pacte social. Elle a sa part de responsabilité dans cette crise et ne pourra s'en prendre qu'à elle-même, les résultats n'y changeront rien.
Le processus électoral
Entre les appels au boycott, les violences électorales, les contestations de la légitimité du président Talon, les intimidations, le peuple a montré une nouvelle fois sa résilience face à l'adversité.
Le taux de participation relativement faible, comparé à celui des précédentes élections, est un indice qui révèle que le processus électoral était "inintéressant", car les dés étant pipés d'avance.
Cela ne change rien ?
Si, au contraire, cela change tout. Le Bénin a besoin d'une alternance.
Quid des régions militarisées?
le seul moyen de sortie de crise reste le dialogue et des concessions