Réflexion : LE TRAVAIL SUR SOI: Partie 1/4

« Thomas Hobbes, né le 5 avril 1588 à Westport (Wiltshire) et mort le 4 décembre 1679 à Hardwick Hall (Derbyshire), est un philosophe anglais » [1]. Dans certaines sociétés savantes, il est classé parmi les philosophes du siècle des lumières. « Le siècle des Lumières débuta en principe au lendemain de la mort de Louis XIV, en 1715, et prit fin à l’avènement de la Révolution française en 1789. Cette période se caractérise, d'une part, par un fort mouvement de remise en question ainsi que par l'établissement d'une plus grande tolérance et, d'autre part, par l'affaiblissement de la monarchie, suivi de la fin de la suprématie française en Europe et du début de la prépondérance anglaise. Des personnalités comme Voltaire, Jean-Jacques Rousseau, Benjamin Franklin ont certainement marqué leur époque de même que Frédéric II de Prusse, Lavoisier, Diderot et Goethe. » [2]. Concernant le siècle des lumières, « Certains historiens, en fonction de leur objet d'étude, privilégient une chronologie plus ou moins large (1670-1820). » [3]

Thomas Hobbes, grand penseur anglais, né au milieu des tumultes et des factions nous a laissé en mémoire, plusieurs ouvrages dont «Léviathan. Traité de la matière, de la forme et du pouvoir de la république ecclésiastique et civile» (Titre original: LEVIATHAN or the Matter, Forme and Power of A Commonwealth Ecclesiastical and civil by Thomas Hobbes of Malmesbury), une œuvre publiée en 1651. Le Léviathan (de l'hébreu : Liviyatan) est dans la Bible, un monstre marin qui apparaît dans les Psaumes, le livre d'Isaïe, et le livre de Job. En 1651, Thomas Hobbes utilise ce monstre comme titre de son livre, « Léviathan ». Dans ce manuel de la philosophie politique, Hobbes indique le chemin fiable pour se faire des connaissances scientifiques. Écoutons Hobbes:

Thomas Hobbes (1651) Léviathan : 1ère partie (De l’homme), Chapitre IV (De la parole) , page 33 à 34: « On voit par là combien il est nécessaire à quiconque aspire à la vraie connaissance d'examiner les définitions des auteurs précédents, et, ou de les corriger quand elles sont avancées négligemment, ou de les faire par soi-même. Car les erreurs se multiplient par elles-mêmes, selon la poursuite du calcul, et elles conduisent les hommes à des absurdités, qu'ils finissent par saisir, mais auxquels il ne peuvent se soustraire sans refaire de nouveau le calcul depuis le début, où se trouve le fondement de leurs erreurs. De là vient que ceux qui font confiance aux livres font comme ceux qui additionnent des petits totaux pour faire un grand total, sans envisager si ces petites totaux [eux-mêmes] ont été les résultats d'additions correctes, et qui, trouvant enfin l'erreur manifeste, et ne suspectant pas leurs premiers fondements, ne savent pas comment s'en sortir, perdent leur temps à voleter à la surface de leurs livres, comme des oiseaux qui, entrés par la cheminée, et se trouvant enfermés dans une pièce, volettent vers la lumière trompeuse des carreaux de la fenêtre, l'intelligence qui leur permettrait d'envisager par où ils sont entrés leur faisant défaut. De sorte que c'est dans la définition correcte des dénominations que repose le premier usage de la parole, qui est l'acquisition de la science, et c'est sur les définitions inexactes, ou sur l'absence de définitions que repose le premier abus, dont procèdent toutes les opinions fausses et insensées qui font que ces hommes qui reçoivent leur instruction de l'autorité des livres, et non de leur propre méditation, se trouvent autant au-dessous de la conditions des hommes ignorants, que les hommes qui possèdent la vraie science se trouvent au-dessus. Car l'ignorance se situe au milieu, entre la vraie science et les doctrines erronées. »[4]

Pour Thomas Hobbes, l'important n'est pas de se précipiter pour trouver réponse à un problème. Pour ce rebelle du siècle des lumières, la recherche de la vérité est un effort, on y parvient d'abord en éduquant sa raison, qui contrairement aux souvenirs et sensations, n'est pas née avec nous . La conséquence que j'en tire est que pour quelqu'un qui a accordé du temps et des privatisations pour éduquer sa raison, il est préférable de débattre avec des ignorants et moins qu'avec des sots. Pour Hobbes, « La sensation et l'imagination naturelles ne sont pas sujettes à l'absurdité. La nature elle-même ne peut pas s'égarer. C'est quand les hommes disposent d'une grande richesse du langage qu'ils deviennent ou plus sages, ou plus fous qu'à l'ordinaire. Il n'est pas possible à un homme, sans les lettres, de devenir ou parfaitement sage ou, à moins que sa mémoire ne soit endommagée par une maladie ou par une mauvaise constitution des organes, parfaitement fou. Car les mots sont les jetons des sages, avec lesquels ils ne font rien d'autre que des calculs, mais ces mots sont la monnaie des sots, qui les évaluent en fonction de l'autorité d'un Aristote, d'un Cicéron ou d'un Saint Thomas, ou de quelque autre docteur qui, quelque docteur qu'il soit, n'est [pourtant] qu'un homme. » [5]

Ainsi, Hobbes apporte une clarification conceptuelle entre la sottise (détenir des connaissances erronées et les brandir comme des vérités) puis l'ignorance (ne savoir rien du tout, n'avoir aucune certitude sur un sujet). La différence entre "Sottise" et "ignorance" éclate, en particulier, dans la Chapitre IV: De la parole, de la première partie : De l’homme, quand il s’agit de justifier la frontière entre la "vraie science" et les "doctrines erronées ". Après ce fondement (l'éducation de la raison), Hobbes conseille de reprendre tous les "petits totaux" en partant du début.

Hobbes était déjà conscient que le prédateur qui a construit la pièce dans laquelle les oiseaux sont piègés et englués, ne peut pas enseigner à ses proies (les oiseaux) les vraies leçons pour se débarrasser facilement de lui. Les oiseaux sont ici proche de la sottise car ils detiennent les connaissances erronées que la prédateur leur a enseigné. Le prédateur leur a fait croire que la porte de sortie se trouve "vers la lumière trompeuse des carreaux de la fenêtre". Hélas, c'est du bluff (Tromperie dans le but de profiter de la naïveté, de la crédulité ou de l’ignorance d’autrui).

Il n'est pas étonnant dans ce léviathan, de remarquer que nombreuses têtes peinent à identifier d'abord le but de l'existence, puis le but et les régles du jeu que leur soumet Big Brother dans cette pièce, qu'est le léviathan. Ces âmes aux ambitions médiocres et aux pensées pauvres se contentent des gains et des places que Big Brother a déjà défini pour eux: ils ne sont donc appelés à cette vie que pour meubler le décor d'un scénario écrit d'avance. C'est la "servitude volontaire" théorisée par Étienne de La Boétie (écrivain humaniste et poète français, né le 1er novembre 1530 à Sarlat, ville du sud-est du Périgord, et mort le 18 août 1563 (à 32 ans) à Germignan, dans la commune du Taillan-Médoc, près de Bordeaux). De La Boétie n'est donc qu'un jeune étudiant en droit de 18 ans à l'Université d'Orléans, lorsqu’il écrit le texte qui le rendra célèbre, vers 1548: Discours de la servitude volontaire ou le Contr’un. Il obtient sa licence en droit le 23 septembre 1553 dans cette université. Dans ce monument de la philosophie politique du 16 ème siècle, La Boétie s’attache à démontrer qu'il n'y a que de la servitude volontaire et non forcée. Il démontre brillamment que de petites acceptations en compromis et complaisances, par l'homme, finissent par accoucher de la soumission tel un choix volontaire fait dès les premiers instants. Bref, l'individu s'enchaîne lui-même. L'une des chances de notre génération n'est-elle pas la possibilité de s'adapter dans le jeu, et y sortir victorieux, sans remettre en cause le système ? Car de loin, le système semble mauvais, imprécis mais ne vaut-il pas mieux que le brouhaha que propose certaines voix? Leurs supputations qui ne convainquent qu'eux-mêmes, ne sont nullement le fruit d'une longue et rigoureuse dialectique mais le produit d'un mélange hétérogène d'idées glanées par ci par là, donc des ont-dits.

Notes:

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[5]

Abdèramane BAGUIDI SEIDOU