Tournant historique : le Tchad met fin aux accords de défense avec la France

Le Tchad a surpris l’opinion internationale en annonçant, le 28 novembre 2024, la fin de ses accords de coopération militaire avec la France. Cette décision, officialisée dans un communiqué gouvernemental, marque un moment clé dans les relations entre les deux pays. Adoptée à l’occasion du 66ᵉ anniversaire de la proclamation de la République tchadienne, elle reflète la volonté d’affirmer une souveraineté nationale longtemps éclipsée par des liens historiques et stratégiques avec Paris.

Depuis des décennies, la France joue un rôle central dans la sécurité du Tchad, notamment à travers ses bases militaires à N’Djamena et son soutien aux forces armées tchadiennes. Les accords de 2019 visaient à renforcer cette coopération, en particulier dans le cadre de la lutte contre le terrorisme au Sahel. Mais la décision du Tchad semble aller au-delà d’une simple révision stratégique : elle exprime une aspiration à redéfinir les priorités nationales, à s’émanciper des schémas postcoloniaux et à explorer de nouveaux partenariats internationaux.

Les raisons avancées par N’Djamena sont multiples. Premièrement, l’affirmation de la souveraineté nationale est un thème récurrent, dans un contexte où l’opinion publique tchadienne critique régulièrement l’influence française dans les affaires intérieures. Deuxièmement, le gouvernement cherche à répondre à des attentes populaires à l’approche des élections législatives, en adoptant une posture nationaliste susceptible de renforcer sa légitimité.

Cependant, cette rupture n’est pas sans conséquences. Militairement, la fin de cet accord soulève des défis pour le Tchad, confronté à des menaces sécuritaires croissantes dans la région sahélo-saharienne. Le retrait des troupes françaises, déjà amorcé dans d’autres pays comme le Mali et le Niger, pourrait laisser un vide stratégique que le Tchad devra combler seul ou avec de nouveaux partenaires. De son côté, la France subit un nouveau revers dans une région où son influence est de plus en plus contestée.

Malgré cette décision, le Tchad insiste sur le maintien de relations amicales avec la France et se dit ouvert à un dialogue constructif. Cette ouverture pourrait servir de base pour établir une coopération renouvelée, moins dépendante et plus équilibrée. En outre, le Tchad semble prêt à diversifier ses partenariats, en se tournant vers des puissances émergentes comme la Chine, la Russie ou la Turquie.

Ce choix du Tchad reflète une tendance régionale où de plus en plus de pays africains cherchent à se libérer des anciennes dépendances coloniales. Dans ce contexte, la décision de N’Djamena pourrait inspirer d’autres nations à repenser leurs relations avec la France, tout en redéfinissant leur place sur la scène internationale.

Alors que les discussions sur les modalités de mise en œuvre de cette rupture se poursuivent, il reste des zones d’ombre : quelles seront les prochaines étapes pour les deux pays ? Le Tchad pourra-t-il maintenir sa sécurité sans l’appui direct de Paris ? Et comment la France réagira-t-elle à ce nouveau défi dans une région stratégique pour ses intérêts géopolitiques ?

L’avenir de cette relation dépendra largement de la capacité des deux nations à trouver un équilibre entre indépendance nationale et coopération mutuellement bénéfique.