Le pape François est mort : la fin d’un pontificat révolutionnaire pour l’Église catholique

Le Vatican a annoncé ce lundi 21 avril 2025, le décès du pape François à l’âge de 88 ans. Hospitalisé à Rome en février pour une bronchite, Jorge Mario Bergoglio, 266e chef de l’Église catholique, s’est éteint après douze années d’un pontificat qui aura profondément transformé l’image du Saint-Siège. Figure de rupture, il laisse une Église plus proche des périphéries, mais toujours traversée de vives tensions internes.

Né à Buenos Aires en 1936, Jorge Mario Bergoglio entre chez les jésuites en 1958. Supérieur de la province d’Argentine durant la dictature militaire (1976-1983), il sera accusé — puis blanchi — de silence ou complicité passive. Malgré ces zones d’ombre, il devient archevêque de Buenos Aires, puis cardinal en 2001. Lors de son élection surprise le 13 mars 2013, il déclare : « Les cardinaux sont allés me chercher au bout du monde. »

Il est alors le premier pape sud-américain, le premier jésuite, et le premier à choisir le nom de François, en hommage à saint François d’Assise, modèle de pauvreté et d’humilité. Dès son apparition au balcon de Saint-Pierre, sans insigne pontifical, il donne le ton.

Son pontificat se distingue immédiatement par sa proximité avec les pauvres et les exclus. Ayant vécu les crises sociales de l’Argentine, il condamne très tôt « l’économie qui tue » et appelle à « une Église pauvre pour les pauvres ».

Il renonce au faste, loge dans un appartement modeste, partage ses repas avec des sans-abri ou des détenus, et parcourt le monde pour porter un message de paix. À Lesbos, à Lampedusa, il appelle à « accueillir l’étranger », dénonçant une « mondialisation de l’indifférence ». Il condamne la politique migratoire des pays occidentaux, notamment les « expulsions cruelles » de migrants par les États-Unis sous Donald Trump.

Très vite, le pape François s’attaque aux dysfonctionnements du Vatican. Il réforme la Curie, tente d’assainir les finances, et fustige l’hypocrisie institutionnelle dans un discours historique en 2014, dénonçant les « maladies spirituelles » de la hiérarchie ecclésiale.

Il engage aussi un processus de décentralisation de l’Église et lance plusieurs synodes sur la famille et la synodalité. Il critique le néolibéralisme, s’engage pour le climat (encyclique Laudato Si’) et prône une Église « en sortie », ouverte aux débats et aux tensions du monde moderne.

S’il ne bouleverse pas les dogmes, François cherche à déplacer les priorités. Il affirme que « l’homosexualité n’est pas un crime », même s’il la qualifie toujours de « péché ». Il rejette l’avortement, le comparant à « un tueur à gages », mais encourage l’accompagnement pastoral plutôt que la condamnation.

Face à la pédocriminalité, il abolit le secret pontifical sur les abus, mais ses mesures sont jugées insuffisantes par les associations de victimes. Il reste cependant le premier pape à avoir nommé des commissions indépendantes pour traiter ces scandales.

Il reste aussi le premier pape à visiter l’Irak, initiant un dialogue fort avec les responsables musulmans chiites et sunnites. Il rencontre le patriarche orthodoxe Kirill, même si la guerre en Ukraine compromet les espoirs de réconciliation. Il appelle à la paix en Terre sainte et condamne la guerre à Gaza comme « une faillite de l’humanité ».

Malgré son aura internationale et son immense popularité, François reste une figure clivante au sein de l’Église. Son ouverture, son ton direct, son souci des périphéries déplaisent aux courants conservateurs. Certains le surnomment « le Gorbatchev de l’Église », craignant qu’il n’en précipite l’effondrement.

Le pape François a laissé une empreinte durable, moins par des réformes dogmatiques que par une vision de l’Église tournée vers les marges, le dialogue et la simplicité. Ses mots, ses gestes et ses choix ont souvent dérangé, mais rarement laissé indifférents. Alors que l’Église s’apprête à entrer dans une nouvelle période de vacance, elle devra décider si elle poursuit ou rompt avec l’élan donné par ce pape hors normes.